Les Tableaux tirés de l'Iliade - LIVRE XXIII
I - TABLEAU : Achille suivi des Thessaliens, donne de nouvelles marques de douleur à son ami Patrocle. Il faut rappeler une partie de la composition précédente, Livre XVIII Tableau I. On voit ici que les chars faisaient le tour de cette espèce de représentation déjà décrite, et qu'Achille a jeté Hector sur le sable, aux pieds du corps de Patrocle. Les murailles de la tente relevées, seraient une différence dans ce tableau, et serviraient à faire voir la disposition des chars, ou plutôt l'espèce et l'ordre de leur marche.
Qui les ébranchent, qui les chargent sur des mulets, peuvent fournir un tableau dépourvu d'intérêt, mais qui produira de la variété dans la totalité de cette suite.
Il doit même être déjà assez élevé pour ne laisser aucun doute ; le mouvement nécessaire à cette construction ; celui des soldats arrivant, déchargeant le bois, tandis que d'autres sont occupés à son arrangement, fournit un tableau d'autant plus agréable, qu'il n'exige aucune contrainte, et que le génie de l'artiste est absolument libre.
Encore faut-il recourir à des circuits pour donner de plus grandes idées sur leur nombre : cependant le groupe principal doit attirer toute l'attention. Il est composé des hommes armés qui portent Patrocle sur des piques, et dont le corps est orné de plusieurs chevelures offertes : on voit même plusieurs personnes qui coupent leurs cheveux, pour ne laisser aucun doute sur un usage des Anciens consacré aux témoignages de la douleur, et qu'il est bon d'exprimer. Achille soutient la tête de son ami. Ce tableau sera peut-être fort étendu en largeur ; mais cette proportion ne doit jamais arrêter dans la supposition que j'ai faite.
On voit un groupe de victimes destinées à être immolées ; les douze Troyens, les chevaux, les chiens, les moutons, les urnes de miel et d'huile. Achille pose sur le corps une tresse de ses beaux cheveux ; on distingue aisément qu'il vient de les couper. Cette action rapportée dans le tableau précédant, ne servira qu'à rendre cette marque d'amitié plus sensible et plus distincte.
L'intérêt des dieux divisés à leur sujet, est souvent un moyen adroit dont il se sert pour l'exécution de son dessein : tel est le sixième tableau qu'il présente dans ce livre ; au milieu de ce qu'il a décrit et de ce qu'il va décrire par rapport à Patrocle, il rappelle Hector. Vénus a lavé et parfumé le corps de ce malheureux prince. Ce moment est passé dans la composition présente ; on peut en juger par les ustensiles qui ont servi à ces usages. Vénus s'éloigne ; Apollon en pied et auprès du corps, ordonne à un nuage qui porte ombre au corps, de s'arrêter et de se fixer. Le commandement est facile à indiquer ; le nuage proportionné au corps, représenté seul, ou beaucoup plus bas que les autres, me paraît ne laisser aucun doute sur les soins de ce dieu pour un corps abandonné sur le sable. Homère nous donne par ce moyen une belle image des soins que le mérite et la vertu reçoivent tôt ou tard.
Car nous avons aujourd'hui une autre idée de celui-ci. Homère pense à tout, et ses idées sont toujours grandes. Achille a besoin du Vent pour brûler plus sûrement le corps de son ami : Iris va chercher les Vents. Ils étaient à table ; on les voit sortir, s'empresser, se pousser, se culbuter pour recevoir les ordres de la divinité. Je crois que ces désordres et tous ces différents mouvements, doivent être d'autant plus agréables, que leur objet est absolument dans la nature.
Qui chassent les nuées, qui élèvent les flots de la mer, dont l'empressement renverse et dérange ce qu'ils rencontrent, est une composition piquante en elle-même, et dont l'exécution est favorable à la fougue du pinceau.
Les effets du feu, l'attention triste et recueillie des spectateurs, et surtout les libations d'Achille, qui verse d'une coupe le vin qu'il a tiré d'une urne d'or représentée à ses côtés, fournissent un tableau qui doit saisir et frapper.
Ils arrangent un voile qui doit servir à la couvrir. On voit dans un éloignement assez considérable les soldats qui forment une élévation sur le terrain que le bûcher occupait quelques moments auparavant.
Les troupes sont rangées le long des barrières. Les prix qu'Achille destine aux vainqueurs des jeux, formeront des groupes aussi brillants que magnifiques. Des vases, des trépieds, des chevaux, des mulets, des taureaux, de belles esclaves, des armes et des talens d'or, que je représenterais, comme je l'ai déjà dit, par des lingots ; ces richesses, ou les parties nécessaires pour en rappeler les idées, seront placées sur le devant du tableau, et ces lices, dont au moins deux des parties se trouvent dans l'éloignement, doivent produire un tableau dont l'effet ne peut être douteux.
Cet exercice était lié aux opérations de la guerre, et les Grecs y attachaient tant d'idées, qu'Homère à du s'étendre dans leur description ; ces détails, d'ailleurs fort inutiles pour nous, me paraissent suffisamment indiqués par un char qui en précède plusieurs autres dans une carrière, et je placerais à son extrémité, sur le premier plan, une captive jeune et belle, un trépied d'or à deux anses, une jument avec son poulain, une cuvette, deux lingots d'or, et une double coupe d'or, dont le pied creux est aussi large que le dessus ; tels sont les quatre prix qu'Achille donne aux vainqueurs de la course des chars. Cette quantité de preuves et leur valeur, prouve ce que j'ai dit en premier lieu sur le cas que l'on faisait de cet exercice dans ces premiers temps.
L'artiste qui voudra représenter cette seconde action des funérailles de Patrocle, doit choisir sur les monuments le groupe de ces combattants qui leur paraîtra le plus convenable, et le poser ensuite sur la nature : mais l'action de cet exercice demandant à être vue de près, le lieu du combat doit être aussi fort resserré. Les hommes ne manquaient pas ; leur nombre était suffisant pour donner en peu de temps les formes désirées à des matières aussi légères que des bois arrangés à la hâte ; et je placerais au milieu de l'espace, comme le dit Homère, la mule et la coupe double destinée aux deux combattants.
Il est cependant certain que nous n'en avons que des idées grossières, en comparaison des Grecs qui pratiquaient ou voyaient journellement pratiquer cet exercice, avec des finesses dont ils sentaient jusqu'aux moindres détails. Homère a vraisemblablement rapporté dans cette occasion des mouvements connus et sentis par les lecteurs de son temps ; mais il nous a conservé dans cette occasion le caractère d'Ulysse d'une façon bien adroite. Quoi qu'il en soit, le poète nous présente un instant plus convenable à l'ignorance où nous sommes sur cet exercice, et je crois que l'artiste doit en profiter ; c'est celui auquel les deux athlètes, Ulysse et Ajax, tombés à terre, se relèvent pour recommencer la lutte. On voit dans un des coins de l'enceinte la belle captive et le trépied destinés aux deux guerriers qui ont combattu.
Et pour exprimer l'instant, je ferais voir le but de la course. Ceux qui viennent de la disputer seraient représentés en sueur et dans un état d'altération naturel après une telle fatigue ; je leur ferais recevoir le prix de la main d'Achille ; il donnerait le dernier ; les trois autres déjà distribués seraient dans les mains des vainqueurs ; cette distribution produirait une richesse en même temps qu'elle répandrait de la clarté. Ces prix consistent dans une urne d'argent bien travaillée, un taureau sauvage, et un petit lingot.
Dans laquelle on voit le combat des deux guerriers armés de toutes leurs armes ; ils ne doivent combattre qu'au premier rang. On peut donc prendre le moment auquel un héraut vient les séparer avec son sceptre.
La boule de fer étant le prix du vainqueur, l'artiste n'en a point d'autre à marquer. Ce tableau sera si peu piquant, que je me dispenserai de le traiter, si les tableaux d'Homère ne méritaient pas toujours une certaine considération ; cette composition sert au moins à éclairer sur un exercice que nous voyons aussi anciennement pratiqué.
Deux jeunes gens, sans autres armes, sont dans l'enceinte, au milieu de laquelle on a dressé un mât : une colombe est attachée avec un long cordon à son extrémité. On voit que le jeune homme qui a tiré sa flèche, a coupé le cordon ; la colombe en emporte une partie ; le reste voltige au bout du mât, et l'on juge par l'action de l'autre jeune homme, qu'il tire sur la colombe envolée. Les haches pourraient être arrangées et piquées en terre par le manche dans un des coins de l'enceinte.
Achille présente les prix à Agamemnon qui veut les disputer. On voit donc Achille qui s'avance du côté d'Agamemnon descendu dans la lice, et reconnaissable par son manteau et sa couronne, auquel un esclave présente un javelot. Ces présents consistent dans une pique, un trépied orné de fleurs et de figures. |
NouveautéVous pouvez visiter le journal d'actualités : http://homerica.msh-alpes.fr/wordpress/. ![]() |